La femme au sein de l’espace public marocain

 

Introduction


Lors de mes dernières vacances de fin d’année passées à New York, mon cousin m’a fait la surprise de me rejoindre, accompagné de son groupe d’amis marocains. À peine arrivés, ils m’invitèrent à prendre un verre dans une discothèque uppée de la pomme, où nous passames une excellente soirée. Cependant, l’ambiance changeat dès le lendemain, car pendant le dîner – en abordant le sujet des bombardements de Gaza – j’ai donné mon avis sur la question en disant qu’il était légitime pour un palestinien de recourir à la violence quand sa terre lui est volée. C’est à ce moment là qu’un de ses amis, professeur à l’Ecole Supérieure de Gestion de Casablanca, rétorqua en me disant d’un air supérieur et arrogant : « Je ne sais pas jusqu’à quel point d’histoire je peux aller avec toi, mais au cas où tu aurais entendu parler de Gandhi, il vaudrait mieux pour les Palestiniens de prendre exemple sur lui et d’arrêter de lancer des rockets sur les Israëliens ». Selon lui, sous prétexte que sa grand-mère est libanaise, personne ne connaît mieux la question, pas même une jeune étudiante qui est passée par la faculté d’histoire à la Sorbonne ! Ainsi, même aux Etats-Unis d’Amérique, une femme marocaine n’a pas le droit de donner son opinion dans un espace public où se trouvent des hommes marocains ! Même là-bas, on trouve le moyen de la mépriser, de l’humilier et de porter atteinte à sa dignité morale, tout simplement parce qu’elle est femme. Toutefois, la femme ne diffère de l’homme que d’un point de vue morphologique, elle est son égale à tous les niveaux hormis du côté physique puisque l’homme est par nature doté d’une musculature plus forte et plus solide. Or, il semblerait que l’opinion diverge à ce sujet au Maroc, car société patriarcale qui place l’homme au dessus de tout, beaucoup empêchent ces dernières de jouir de certaines libertés, ne serait-ce que morales et intellectuelles, et d’accéder à certains espaces publics locaux, nationaux ou mêmes internationaux ! Mais au nom de quoi est légitimée cette hiérarchie ? Au nom de quoi l’homme serait-il supérieur à la femme ? Pourquoi les institutions étatiques n’entrent-elles pas en jeu pour abolir ces inégalités ? Qu’est-ce qu’un pays démocratique où la femme n’est pas prise en compte, y compris dans les espaces publiques politiques ? C’est ce que nous allons traiter dans cette dissertation, avec en première partie, pour mieux comprendre les sources du problème, un regard sur le sens commun et les stéréotypes portés sur les femmes au Maroc ; puis, dans une seconde partie, un regard analytique qui essayera d’expliquer les raisons du sexisme au Maroc et qui se voudra être un regard quelque peu critique mais néanmoins nécessaire dans la mesure où mettre le doigt sur l’origine d’un problème c’est déjà faire un pas vers son dénouement.

I- Regard sur le sens commun vis-à-vis des femmes au Maroc :

Nous vivons aujourd’hui dans un pays où la situation de la femme est délicate dans la mesure où celle-ci porte plusieurs stigmates. En effet, beaucoup de préjugés sexistes persistent au Maroc, comme le fait de penser que l’homme est par nature plus puissant et plus intelligent que la femme, qu’il est supérieur à la femme, que la femme est une tentatrice qu’il ne faut pas hésiter à brimer pour ne pas être séduit, ou encore que toutes les femmes sont des « putes ». La femme est donc un individu méprisé au sein des espaces publiques et privés marocains, elle est même diabolisée. Ces idées reçues sont la preuve que la femme marocaine d’aujourd’hui n’est pas perçue de manière objective ni traitée à sa juste valeur car bien que les infrastructures et les modes de vies se soient modernisés, les mentalités demeurent moyenâgeuses. Aucun respect intrinsèque n’est accordé à la femme marocaine, et aucun homme n’a de scrupules aujourd’hui pour ne pas draguer une femme dans l’espace public commun ; qu’elle soit arabe, berbère, étrangère, mariée, enceinte, jeune fille, vieille dame, vierge ou « pute » ; car il partira forcément du postulat qu’il est supérieur à elle, que celle-ci n’a pas son mot à dire et que toutes les femmes, même les jeunes vierges à peine mariées, sont des « putes ». Les hommes s’octroient des droits qu’ils interdisent aux femmes, et légitiment tous leurs vices par leurs besoins physiologiques ou par leur simple statut d’homme. En effet, lors de diverses discussions avec mon cousin portant sur le thème de l’infidélité, celui-ci me confiait qu’il était incapable de rester fidèle à une femme car un homme a par essence le besoin de changer de partenaire, de se divertir et d’assouvir certains fantasmes, qu’il a des pulsions sexuelles incontrôlables. Je lui demandais alors s’il accepterait ce genre de propos venant de sa partenaire. Celui-ci répondait toujours que non dans la mesure où « les femmes sont différentes, que lorsqu’elles aiment elles ne peuvent tromper leur conjoint et que de toutes les manières elles n’avaient pas les mêmes envies ou les mêmes pulsions frénétiques de sexe. Celles qui sont comme ça sont des nymphos ». Ainsi, inconsciemment, celui-ci considère que les femmes n’ont pas les mêmes sentiments ni les mêmes sensations que les hommes, qu’elles sont biologiquement différentes. D’ailleurs, cette vision des choses me rappelle fortement, à titre figuratif, le mouvement eugéniste utilisé par Adolf Hitler pour légitimer ses crimes à l’encontre de l’humanité, cela en prônant de fausses théories scientifiques qui affirmaient que certains hommes étaient biologiquement « dégénérés ». Certes Hitler a commis un crime contre l’humanité à l’échelon d’une nation toute entière en assassinant des millions de personnes, mais qu’en est-il des meurtres moraux ? Quelle est la différence ? Je n’en vois personnellement aucune dans la mesure où plusieurs femmes marocaines sont psychologiquement anéanties par l’oppression quotidienne des hommes, qui s’exerce à tous les niveaux de leur vie, à savoir dans tous les espaces publics marocains mais aussi dans leurs espaces privés et intimes. Assurément, nombreuses sont les femmes qui sont moralement harcelées et torturées au Maroc, victimes des inégalités et de l’injustice instaurées par les hommes. En effet, étant donné que la gente masculine marocaine ne peut encore concevoir qu’une femme qui porte une mini-jupe et qui fume dans l’espace public peut aussi être une femme respectable dotée de beaucoup d’éthique ; ils lui interdisent l’accès à plusieurs de ces espaces et cela de manière tacite puisqu’elle se compromettrait en attirant sur elle ce genre d’attentions. Même dans les zones les plus ouvertes d’esprit, les hommes aboutiraient inéluctablement à la conclusion que celle-ci est une « pute », le penseraient si fort que cela s’entendrait, et se donneraient le droit de la draguer ou de lui manquer de respect. Cette forme de mépris et d’irrespect est, comme nous l’avons dit plus haut, d’autant plus dangereuse qu’elle exerce une forme d’oppression morale sur les dames, qui souffrent alors de ne pas pouvoir jouir de la même liberté de pensée et d’action que les hommes. Je reprendrai encore une fois un des exemples de mon séjour de fin d’année à New York pour dire que lors d’une discussion avec mon cousin et ses amis, l’un d’entre eux me dit : « Mais tu sais nous les hommes, on ne fait plus confiance aux femmes marocaines et c’est pour ça qu’on n’arrive plus vraiment à nous investir dans les relations. Elles sont toutes devenues des putes, et rares sont celles qui ont gardé les vraies valeurs, rares sont celles qui savent se respecter ». Je lui répondit alors : « Est-ce que tu penses franchement que les petites nénettes qui posent devant toi avec toutes leurs manies arrivistes et leur protocole à deux balles sont aussi pures et innocentes que tu le crois ? Tu peux me faire confiance, c’est en général celles-ci qui ont vu des bites de toutes les couleurs, et qui en ont prises de tous les côtés ! » Il fût alors choqué de ma manière de répondre, m’a demandé de me répéter tellement il avait du mal à en croire ses oreilles, mais je m’empressait alors de lui expliquer que je n’appréciais pas qu’une femme émancipée, qui n’a pas peur de s’afficher avec son petit ami, de porter une mini-jupe, de fumer une cigarette, des joints ou encore de consommer de l’alcool soit considérée comme une fille aux mœurs légères, indigne d’avoir le respect d’autrui. Je lui expliquait que moi-même, « qui a une si grande gueule », n’avait connu que deux hommes dans ma vie, avec qui d’ailleurs j’ai partagé des relations d’amour et de passion des plus fortes. Est-ce que cela faisait de moi une « pute » au même titre que toutes les autres ? Est-ce parce que je discutais ouvertement avec lui, une cigarette et un verre à la main, que je ne méritais pas tout le respect du monde de sa part ? Il me répondit que dans mon cas c’était « différent ». Mais en quoi ? Pourquoi ? Tout simplement parce que les hommes marocains acceptent toutes sortes de choses venant des femmes marocaines dans les espaces publiques, mais surtout pas lorsqu’il s’agit de leur sœur, de leur femme, de leur fille, ou même de leur mère – à qui ils interdisent un bon nombre de choses dès qu’ils atteignent un certain âge -. Pour eux, il y a les filles à marier ; puis il y a les autres : les filles sans noms, celles dont on ne daigne même pas se rappeler. Ne s’agit-il pas encore une fois d’un système de déshumanisation propre aux hommes marocains et qui est scandaleusement proche de ceux utilisés par Hitler lors des déportations dans les camps de concentration ? Les femmes marocaines ne sont-elles pas triées comme les déportés juifs ou tziganes ? Déshabillées ? Tatouées de sperme comme les marocains se plaisent à dire ? Matriculées par leurs numéros de téléphones…? Sachez que ceux sont là les étapes les plus significatives de la déshumanisation d’un individu : désormais, la détenue n’est plus femme, elle n’a plus d’identité. Méprisée, dépréciée, négligée, inconsidérée, invisible, transparente, commune… la femme marocaine est chaque jour touchée dans sa dignité. Elle est vue comme une tentatrice qui réveille les instincts les plus primaires des hommes et doit selon eux être mise de côté pour ne pas avoir l’occasion de titiller leurs envies animales. En effet, il y aurait même certains « bleds », des patelins perdus ou encore des quartiers extrêmement défavorisés, où celle-ci pourrait se faire injurier, insulter, agresser, frapper, battre, tripoter ou violer si elle en venait à animer les pulsions animales des hommes, qui sembleraient ne pas pouvoir se contrôler et qui, par frustration, réagiraient indéniablement de manière barbare et animale puisque seul un animal n’est pas capable de contrôler ses pulsions et y cède sans raison. D’ailleurs, plusieurs femmes ont essayé de gagner le respect des hommes en se voilant – ce qui pour na part est hypocrite puisque le voile est un symbole religieux et non pas une arme contre la drague, et doit être porté par conviction – or elles ont vite déchanté puisque même les femmes voilées se font harceler par des inconnus et se voient rejetées des espaces publics marocains tels que les cafés, ou plus scandaleux encore, les rues après neuf heures ou dix heures du soir dans ce genre de milieux. Le voile ne suffit plus aujourd’hui. Plus rien ne suffit. Plus rien n’est possible. Cependant, je n’aimerai pas me montrer fataliste. Bien au contraire, je porte en moi la croyance que c’est en essayant d’aller au fond des choses, en tentant d’en connaître et d’en comprendre le « pourquoi », que l’on peut prétendre « penser » des solutions efficaces et réalistes aux problèmes rencontrés. Ainsi, je vais me focaliser dès à présent sur les questions suivantes : pourquoi tous ces préjugés ? A quand remontent toutes ces injustices ? Quelle est l’origine de ce phénomène ? Quelle est l’origine de cette idéologie communément admise ? Cette idéologie provient-elle de la religion, de la culture ou alors de groupes d’intérêts qui en profitent ?

II – Regard sur l’origine du sexisme au Maroc : le détournement de la religion musulmane et l’éthnocentrisme

Il est dramatique de constater qu’à l’aube du XXI° siècle, les hommes continuent d’asseoir leur autorité sur les femmes par la violence physique et morale, et cela que ce soit au sein de l’espace public ou de l’espace privé puisque dans la rue ou à la maison, ils se permettent de les insulter ou de les frapper sans que personne n’intervienne. C’est à vrai dire comme s’il n’existait pas d’espace public pour les femmes, qui ne sont finalement qu’un objet de plaisir pour les hommes, objet qui en plus de procurer des orgasmes fait la vaisselle ! La principale raison de ce problème de sexisme dans les espaces publics marocains est à mon sens l’instrumentalisation de la religion par certaines instances intermédiaires qui n’ont pas hésité une seule seconde à inventer de nouvelles règles et normes afin de maintenir leur autorité sur les populations. En effet, nous prendrons un exemple flagrant qui a eu lieu récemment : un Imam reconnu et renommé à tendance intégriste s’est prononcé sur les espaces publics professionnels auxquels ont accès les femmes en affirmant que les femmes ne peuvent travailler si leurs métiers respectifs les mêlent à des hommes, hormis si elles leur donnent le sein à téter puisque dans ce cas précis elles deviendront comme des mères de lait pour ces hommes, qui pourront dès lors les voir sans qu’elles aient à porter leur voile ! Ces propos sont de réelles insultes envers la religion musulmane, qui n’a véritablement jamais établi ce genre de règles, d’autant plus qu’ils sont totalement contradictoires à la vie même du Prophète Mohamed (saws) et à celle de ses femmes, dont une d’entre elles était commerçante et se rendait seule à son travail en chameau, côtoyait beaucoup d’hommes lors de ses échanges commerciaux au sein des différents espaces publics qu’elle pouvait côtoyer. Il semblerait donc que nous régressions au lieu de progresser et d’aller de l’avant, et que l’Islam est instrumentalisé de manière flagrante afin de servir les intérêts de certains Imams et de certains hommes de pouvoir qui veulent avoir main mise sur tous les domaines de la vie de leurs sujets, et qui se plaisent à humilier les femmes. En effet, la propagande saoudienne a établi les normes « du bon musulman et de la bonne musulmane », les uns ayant pour devoir de travailler et de rapporter de quoi vivre à la maison, les unes ayant pour rôle principal de préparer à manger, de s’occuper des enfants et de la maison et d’écarter les jambes avant de dormir ; et tout cela sans aucun mot à dire ! Or, tout cela n’est que manipulation qui provient de l’idéologie Wahhabite, dont les précurseurs ont, dès la mort du Prophète (saws), assassiné toute sa famille pour acquérir le pouvoir. Ainsi, la plupart des musulmans pensent agir de manière juste en traitant les femmes de la sorte, mais ce n’est aucunement le cas puisqu’ils sont totalement à l’opposé des vraies valeurs de l’Islam, religion qui prône la bienfaisance et le respect du prochain, et non pas la violence physique et morale, l’humiliation et la condescendance. En effet, l’Islam est la première religion à avoir octroyé des droits à la femme, considérée dès lors comme un être égal à l’homme. C’est par conséquent la propagande saoudienne qui a principalement déformé la ferveur des musulmans et qui a diffamé ce culte monothéiste offrant au monde une merveilleuse sagesse divine. L’hégémonie masculine bat donc ses records aujourd’hui parce que personne n’ose remettre en question les propos des Imams, aussi discutables qu’ils soient. Certes ces derniers sont des leaders d’opinion imposants car ils représentent « la figure du sacré », mais il n’empêche que la majorité de leurs discours ne sont que balivernes et mensonges, et que bien malheureusement, beaucoup d’entre eux utilisent la religion afin d’endoctriner des sujets, incapables pour la plupart de faire travailler leurs esprits et de raisonner logiquement. Les sujets ont alors les esprits, et donc les mentalités, intoxiqués par les déclarations des Imams qui sont corrompus par les hommes de pouvoir ; ce qui se répercute malheureusement sur les femmes. Le pis est sans aucun doute que toute une nation accepte cela sous prétexte que cela fasse partie de notre culture. Or, nous savons tous que l’ethnocentrisme est un phénomène grave et dangereux dans la mesure où il pousse les individus à ne pas remettre en question leurs opinions – souvent fausses – et à privilégier leurs valeurs et les formes culturelles qu’elles prennent sans aucun examen critique de la raison. Par conséquent, même si ces valeurs pseudo morales sont intolérables, ils y adhèrent. En effet, je considère que les marocains ont un « comportement social et une attitude inconsciemment motivés » envers les femmes, ce que l’on perçoit facilement au sein des espaces publics, mais aussi envers les autres peuples, qu’ils considèrent comme des peuples dépravés où règnent tous les vices. Indubitablement, ils « surestiment le groupe racial, géographique, ou national auquel ils appartiennent, aboutissant parfois à des préjugés en ce qui concerne les autres peuples », ce qui est exactement la définition de l’ethnocentrisme et ce pourquoi je me permet de porter ce genre d’affirmations. D’ailleurs, pour mieux étayer mes propos, je vais vous faire part de l’expérience suivante : lors de mon étude sociologique du nom de « Que préfèrent les parents ? EMANCIPEE ou VIERGE SODOMISEE ?? » réalisée en première année de licence à Com’Sup, il m’est arrivé de demander à un des participants au débat sur Facebook pourquoi il acceptait et appréciait certains comportements de la part des étrangères et pas des marocaines. Celui-ci me répondit que les étrangères sont amorales dans la mesure où elles ne sont pas musulmanes, et par conséquent, qu’elles sont vicieuses et débauchées par nature, par éducation. Selon lui, le fait qu’il soit considéré comme « normal » dans les pays occidentaux que les femmes aient des relations sexuelles à partir de treize ans (la moyenne est de 15 – 16 ans en réalité), qu’elles invitent leurs petits copains au foyer familial, qu’elles affichent leur sexualité dans la rue lorsque celles-ci sont lesbiennes ou autre, qu’elles vivent seules, qu’elles expérimentent leur sexualité avec plusieurs partenaires, qu’elles conçoivent le concubinage ou encore la maternité sans conjoint… change la donne car ce sont des comportements culturels que l’on se doit de « tolérer », mais que l’on ne peux reproduire… Ainsi, ce sont à ses yeux les signes d’une décadence flagrante et d’un endommagement des valeurs morales et éthiques, des valeurs « authentiques » ; mais que l’on ne peux se permettre de vouloir changer dans la mesure où c’est « leur manière de vivre, leur manière de penser, qu’ils sont comme ça ». Alors on en profite, on va faire nos études à « l’étranger », on rigole, on s’amuse, on est « cool » ; mais dès que l’on rentre au « bled », la rigolade est finie, pas question d’autoriser ce genre de choses à nos proches, encore moins de les tolérer. Tout peux donc se faire ailleurs chez les pervers, mais surtout pas chez nous, où l’on se doit de cultiver de bonnes mœurs… Quelle hypocrisie ! Lorsqu’un homme cautionne certaines choses parce que ça l’arrange, parce que ça réponds à ses intérêts particuliers, et qu’en plus il y participe, je considère alors qu’il est davantage corrompu que ceux qu’il juge et condamne lui-même ! Plus scandaleux encore que cette hypocrisie sociale, que l’hypocrisie avec autrui, il y a le fait d’être hypocrite avec soi-même : les femmes revendiquent ce genre de comportements, sous prétexte qu’un homme qui ne leur interdit pas certaines attitudes ou comportements ne les aime pas assez, qu’il ne les prend pas suffisamment au sérieux et qu’il ne fait que « passer son temps » avec elles. Elles se voilent la face, et évidemment acceptent avec joie toutes les discriminations dont elles sont victimes, fières d’appartenir à « UN HOMME » ! Il n’est plus étonnant alors d’entendre certains de nos camarades de classe du « sexe fort » dire que « s’ils ne maltraitent pas les femmes marocaines et ne les harcèlent pas dans les espaces publics, alors ce sont des pédés » ou encore certaines jeunes étudiantes de Com’Sup dire que « c’est normal que les femmes se fassent harceler par les hommes dans les espaces publics marocains, ce sont elles qui les provoquent, ce sont des putes alors c’est normal » car le sexisme et toute la violence morale qu’il induit sont devenus monnaie courante, un fait banal du quotidien, une routine insignifiante et plate. Effectivement, les femmes sont restées silencieuses, n’ont pas réagit, puis se sont accoutumé à « la drague dans la rue », ont accepté les gifles reçues et enfin, ont fini par pardonner leurs crimes aux hommes ! En réponse à la domination masculine, les femmes se sont totalement détachées, désaffectées… les femmes ont opté pour l’indifférence. Mais quoi de plus prévisible comme réaction dans un pays qui se veut démocratique mais qui pourtant n’intervient pas en faveur des citoyennes ? Quoi de plus prévisible comme réaction dans un pays qui se veut démocratique mais qui pourtant ne fournit aucun effort pour sensibiliser la population à ce sujet ? Mais ne risque-t-on pas de devenir fous un jour lorsqu’engagés pour la cause féminine au Maroc, l’on parle de ce sujet de dissertation à table et que l’on obtienne pour seule réponse : « N’importe quoi ! Tu es en train de réinventer les choses et de diaboliser la vie au Maroc ! Il n’y a rien de tout cela, ce n’est qu’une simple construction de ton esprit ! » ??

 

Conclusion

En conclusion, j’avouerai sincèrement et honnêtement que j’ai la nette impression de vivre dans une société complètement schizophrène, régie par une logique totalement déraisonnable. C’est peut-être là l’expression d’une profonde frustration, voire d’un plaisir pervers qu’auraient les femmes à se faire maltraiter et humilier par les hommes ; ou tout simplement l’expression d’un réel malaise dans la culture qui s’expliquerait par la forte crise identitaire que vivent les marocains en ce moment à cause des répercussions de la mondialisation sur leur culture. Quoi qu’il en soit, les femmes marocaines ne comprennent-elles pas que c’est par le biais du silence que les choses risquent d’empirer ? Il me semble en tous cas évident qu’elles ne pourront améliorer leurs conditions de vie, ni leurs rapports interpersonnels au sein des différents espaces publics et privés marocains, en ayant ce genre de comportement. Elles sont en effet totalement apathiques, pratiquement léthargiques, et inconsciemment en train d’encourager les hommes à persévérer dans cette attitude négative. Cependant, pourquoi l’Etat n’opte-t-il pas pour des mesures draconiennes afin de réguler les rapports entre hommes et femmes au sein des espaces publics nationaux ? Certes, la Nouvelle Moudawana, qui est le Code du statut personnel marocain révisé en février 2004, marque l’avènement d’une nouvelle ère pour les femmes marocaines : désormais, elles peuvent épouser un homme sans l’autorisation de leurs parents, se marier dans d’autres pays, empêcher leur mari d’épouser une autre femme si elles ne donnent pas leur consentement – ceci n’est pas obligatoire en Islam -, garder le domicile familial si elles obtiennent la garde de leurs enfants, poursuivre en justice les hommes qui les harcèlent sexuellement et être sûr que ces derniers seront punis par la loi…etc. Cependant, il semblerait que ces réformes, aussi grandioses qu’elles soient, n’aient pas réellement changé les mentalités car trop de problèmes parallèles, mais pourtant complémentaires, empêchent les esprits de changer : la misère, l’analphabétisme, l’ignorance, le manque d’éducation, la corruption, la pression religieuse, sociale et familiale, l’auto censure, la peur du « qu’en dira-t-on »… Par conséquent, il faudrait peut-être avant tout songer à l’éducation de nos jeunes, et enfin, utiliser nos espaces publics non pas comme des espaces de violence et de guerre de tous contre tous mais plutôt comme des espaces de communication où l’on pourrait agir librement et dans le respect de tous pour partager nos pensées et nos opinions, pour essayer de contribuer au bien général. Ce sont là les vraies valeurs d’un bon musulman.

 

ANNEXES

Selon Margot Badran, chercheuse au Centre pour la compréhension entre musulmans et chrétiens du prince saoudien Al Walid bin Talal à l’Université de Georgetown (Etats-Unis) [où Mr. Nabyl Eddahar a donné des conférences d’ailleurs], les concepts centraux de ce mouvement sont l’égalité des femmes et la justice sociale. Selon Badran: « L’islam est la seule des trois religions du Livre à avoir introduit dans ses textes – le Coran considéré comme la parole de Dieu – l’idée d’une égalité fondamentale de la femme et de l’homme (l’un et l’autre étant considérés comme des êtres humains, ou insan), et à y inclure la question des droits des femmes et de la justice sociale. C’est ce message qui a été perverti au nom de l’islam lui–même. Le patriarcat préexistant, que le Coran est venu tempérer et finalement éradiquer (…) s’est montré fort résistant. Et c’est en dépit de la persistance du patriarcat que la religion musulmane fut adoptée. La manipulation par les franges dominantes de la société fut telle que l’islam finit par être perçu comme naturellement patriarcal au point d’effacer la contradiction inhérente entre la parole révélée et le patriarcat et d’anéantir toute revendication islamique en faveur de l’égalité des sexes et de la justice sociale. Ce n’est pas le moindre paradoxe de constater que la seule religion qui a inscrit l’égalité des sexes dans ses textes se retrouve aujourd’hui considérée comme la plus machiste de toutes (…) Les musulmans machistes, au niveau étatique, social ou familial, et les détracteurs de l’islam ont un intérêt commun, quoique pour des raisons différentes, à perpétuer cette fiction d’un islam patriarcal. » Margot Badran affirme que le féminisme islamiste revendique une conception égalitaire de l’oumma, ou communauté des croyants, qui transcende les divisions Orient/Occident, public/privé, séculier/religieux, et rejette l’idée d’un Etat islamiste.

Comments
2 Responses to “La femme au sein de l’espace public marocain”
  1. A.b. dit :

    Introduction:

    Le violence ne fait qu’attiser la feu de la haine qui à son tour alimente la violence.

    Si la réplique des palestiniens par des rockets avait été la bonne, ils n’en seraient pas là aujourd’hui !

    L’exemple de Ghandi est la parfaite illustration de la victoire de la lumière.

    Le monde est un champ énergétique ou s’entrechoquent les fréquences vibratoires.

    Ghandi a su canaliser l’amour de tout un peuple pour réveiller la conscience de leur oppresseur.

    Je suis sûr que le professeur a du mal s’exprimer, et que sa remarque a du être mal placée.

  2. Bennis Nora dit :

    Point de vue très remarqué.

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